À la fois festifs et profondément tragiques, Les Colocs sont un groupe tout en contrastes qui a transformé à jamais la musique québécoise. Fondée par le chanteur André « Dédé » Fortin (qui, avec le guitariste Mike Sawatzky, sera le seul à rester à la suite des nombreux changements de personnel), la formation débarque avec un premier album éponyme en 1993. Porté par le succès de l’irrésistible « Julie » puis par celui de « La rue Principale », où Dédé critique la modernisation sauvage de son village natal de Saint-Thomas-Didyme, l’album se vend à près de 200 000 exemplaires. Grâce à des concerts explosifs et à un mélange alliant rock, chanson, klezmer, blues, ska, rockabilly et plus encore, Les Colocs s’imposent comme le groupe de party par excellence. Dédé Fortin est aussi un artiste engagé qui dénonce les injustices et affiche sa fougue indépendantiste. Il décide de lancer le deuxième album du groupe, Atrocetomique, le soir du référendum de 1995, et apprend la victoire du camp du Non alors qu’il est en direct à la télé. En 1998 paraît leur chef-d’œuvre, Dehors novembre, où l’on perçoit de nouvelles influences, avec l’intégration des frères Diouf qui chantent en wolof le refrain de la populaire « Tassez-vous de d’là ». Le thème de la mort y est omniprésent (la pièce titre est un hommage à l’harmoniciste Patrick Esposito di Napoli, emporté par le sida), exposant les démons qui habitent Dédé. Le 11 juillet 1999, le groupe donne son ultime spectacle au Festival d’été de Québec, un moment magique capté pour la postérité. Moins d’un an plus tard, on apprend que Dédé s’est enlevé la vie. Lancée en 2009, la chanson posthume « La comète » permet de mesurer l’immense vide causé par son départ.