Presque aussi taciturne en répétition qu’il l’était devant la presse, Abbado utilisait toute l’expressivité de sa direction d’orchestre pour transmettre aux musiciens ce qu’il exigeait en termes de couleur instrumentale et de phrasé. Il se montrait particulièrement à l’aise dans les interprétations des répertoires de Moussorgski, Verdi, Prokofiev et Debussy, mais également dans les pièces s’inscrivant dans la tradition symphonique lyrique de Schubert, Mendelssohn et Mahler. Né à Milan en 1933 dans une famille de musiciens, Abbado décide de devenir chef d’orchestre après avoir assisté à une somptueuse représentation des Nocturnes (1892-1899) de Debussy. Son goût s’étend progressivement à un répertoire plus impressionniste ; c’est ainsi que le premier opéra qu’il dirige en 1959, L’amour pour trois oranges, est tiré de l’œuvre enjouée de Prokofiev (1921). Malgré sa nature timide, Abbado parvient, du fait de son talent, à obtenir des postes de haut rang en tant que chef d’orchestre ou directeur artistique de plusieurs orchestres et compagnies d’opéra prestigieux, notamment l’Orchestre symphonique de Londres, la Scala — où il présente le travail de compositeurs contemporains tels que Luigi Nono —, l’Opéra d’État de Vienne et l’Orchestre philharmonique de Berlin. Abbado fonde lui-même plusieurs orchestres composés de jeunes musiciens talentueux, qui créent à leur tour des collectifs comme l’Orchestre de chambre d’Europe et le Mahler Chamber Orchestra. Il décède en 2014, laissant derrière lui un répertoire vertigineux.